La Safer peut préempter des biens, c’est-à-dire les acquérir de manière prioritaire par rapport à tout autre acquéreur, sous réserve de la réunion d’un certain nombre de conditions. Pour ce faire, les Safer collaborent avec les notaires.
En cas de cession de biens à usage ou à vocation agricoles, les Safer disposent en principe d’un droit de préemption. Il s’agit du droit de se porter acquéreur en lieu et place de l’acheteur choisi par le propriétaire. Ce droit peut, par exception être ramené à un simple droit d’information. Longtemps cantonnées aux biens immobiliers, ces prérogatives ont été étendues en 2014 aux parts de société pour tenir compte de l’évolution du phénomène sociétaire en agriculture.
Toutefois, et à la différence des mutations de biens immobiliers, le simple droit d’information est la règle en cas de cession de parts sociales, le droit de préemption étant l’exception.
Tout cédant de parts sociales doit en conséquence se poser deux questions :
- ma société est-elle concernée ?
- si oui, l’opération que j’envisage entre-t-elle dans le cadre du droit d’information ou du droit de préemption ?
Question 1 : ma société est-elle concernée ?
Le Code rural prévoit que seules les sociétés ayant pour objet principal l’exploitation ou la propriété agricole sont concernées par cette obligation. Une question demeure ouverte sur ce point : s’agit-il de se référer à l’objet social de votre société tel qu’écrit dans les statuts (critère objectif) ou faut-il tenir compte de son activité effective (critère subjectif).
La première solution vous permettrait de disposer d’un critère de réponse fiable mais ouvrirait la porte à de nombreuses dérives. La prudence devrait donc vous conduire à prendre en compte la réalité de l’activité de votre société. À cette heure, cette question n’a toutefois pas de réponse tranchée.
Question 2 : l’opération que j’envisage entre-t-elle dans le cadre du droit d’information ou du droit de préemption ?
La réponse à cette seconde question est heureusement plus simple à apporter : si la cession que vous envisagez ne porte pas sur 100% des parts sociales de la société, votre opération ne donnera lieu qu’à une information de la Safer. Notez que si vous cédez 100% de vos parts mais que vous n’êtes pas le seul associé de votre société, votre cession restera du ressort du droit d’information.
En revanche, si votre cession porte sur 100% des parts de la société, la Safer disposera d’un droit de préemption. Cette exception comporte elle-même (comme souvent en droit) ses propres exceptions. Notamment, si vous cédez à un membre de votre famille (jusqu’au 4e degré inclus), la Safer verra son droit de préemption se retransformer en droit d’information. Simple non ?
Il est difficile d’aborder le droit de préemption en cas de cession de parts de société sans aborder la douloureuse question de la fraude. En effet, il est légitime, dans le cadre de l’installation progressive de votre successeur de lui céder dans un premier temps 50% des parts de votre société et de lui vendre les 50% restant quelques années plus tard. Il peut être plus discutable de céder à un acquéreur 99% des parts de la société et de lui en vendre le 1% restant un an plus tard… Ces deux opérations étant soumises à l’obligation d’information, il reviendra à la Safer, en cas de doute, de prouver la fraude afin de rétablir son droit de préemption.
Article paru dans Viti Leaders de mai 2022 et disponible sur le site www.mon-viti.com